lundi 16 novembre 2009

L'OMBRE DU VENT / LE JEU DE L'ANGE (Carlos Ruiz Zafon - Grasset / Robert Laffont)

QUI ? Né à Barcelone en 1964, Carlos Ruiz Zafon s'est d'abord fait connaître en Espagne par des romans jeunesse avant d'exploser avec L'ombre du vent. Vit aujourd'hui à Hollywood.
QUAND ? Barcelone en 1945 pour L'ombre..., les années 20 pour Le jeu de l'ange (dont l'action est antérieure à L'ombre du vent, petite précision utile).
QUOI ?  L'ombre du vent : Un homme emmène son petit garçon - Daniel Sempere, le narrateur - dans un lieu mystérieux du quartier gothique : le Cimetière des Livres Oubliés. L'enfant, qui rêve toujours de sa mère morte, est ainsi convié par son père, modeste boutiquier de livres d'occasion, à un étrange rituel qui se transmet de génération en génération : il doit y " adopter " un volume parmi des centaines de milliers. Là, il rencontre le livre qui va changer le cours de sa vie, le marquer à jamais et l'entraîner dans un labyrinthe d'aventures et de secrets " enterrés dans l'âme de la ville "... Le jeu de l'ange : David Martin, dix-sept ans, travaille au journal La Voz de la Industria. Son existence bascule un soir de crise au journal : il faut trouver de toute urgence un remplaçant au feuilletoniste dominical. et David est choisi. Son feuilleton rencontre un immense succès mais, épuisé, le jeune homme finit par renoncer. Puis arrive une offre extraordinaire : un éditeur parisien, Corelli, lui propose, moyennant cent mille francs, une fortune, de créer une texte fondateur, sorte de nouvelle Bible, « une histoire pour laquelle les hommes seraient capables de vivre et de mourir, de tuer et d être tués, d 'offrir leur âme »... A noter : les deux livres peuvent se lire séparément mais Ruiz Zafon a jeté des ponts entre eux : la fameuse librairie Sempere  figure dans Le jeu de l'ange, tout comme le fabuleux Cimetière des Livres Oubliés, au coeur des deux intrigues.

ALORS ? Paru en 2004 (eh oui, déjà 5 ans !) L'ombre du vent a marqué son temps : tout-à-coup, un jeune auteur espagnol inconnu réinventait le roman de genre dans une fresque picaresque qui empruntait tout aussi bien au policier qu'au fantastique, en passant par l'intrigue, le mystère et le roman-feuilleton. Des millions de lecteurs (dont nous sommes) ont succombé à la formule et plébiscité le talent de Ruiz Zafon à travers le monde. Placé sous le haut patronnage d'Alexandre Dumas, Dickens ou Conan Doyle, L'ombre...  témoignait d'une maîtrise narrative assez exceptionnelle . Le jeu de l'ange reprend nombre de ses ingrédients en accentuant l'aspect gothique : Ruiz Zafon nous donne sa propre version du mythe de Faust et ajoute au roman noir une dimension fantastique clairement affichée. Ruiz Zafon n'a rien perdu de son efficacité romanesque (Le jeu de l'ange ménage quelques scènes d'anthologie et de belles figures de roman, à commencer par la pétillante Isabella) mais l'irruption du surnaturel rompt l'unité du livre et rend la lecture parfois déconcertante, notamment lors du dénouement. Alors oui, forcément, on est un peu déçu : on sent bien que Ruiz Zafon a voulu élever son roman-feuilleton à un rang nouveau, celui de l'allégorie et du symbole mais peut-être l'univers de L'ombre du vent n'était pas le meilleur terrain pour tenter l'expérience. Lecture néanmoins recommandée, la valeur et l'intensité dramatique restent hors norme.

Aucun commentaire: